Donald Trump le premier choix de Netanyahou?

Dan Illouz

L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis est-elle une “aubaine” pour Benyamin Netanyahou et la droite israélienne?

Nous avons posé cette question au juriste et politologue canado-israélien Dan Illouz, membre actif du Parti Likoud, ex-conseiller législatif du Likoud à la Knesset, ex-conseiller juridique du maire de Jérusalem, Nir Barkat, et ancien conseiller auprès de la division juridique du ministère israélien des Affaires étrangères, où il a supervisé le volet juridique de la rédaction de plusieurs traités internationaux.

“La majorité des analystes politiques des questions israéliennes et moyen-orientales ont affirmé, souvent avec une assurance déconcertante, que Benyamin Netanyahou préférait largement l’élection du candidat républicain, Donald Trump, plutôt que celle de sa rivale démocrate, Hillary Clinton.  Même s’il est vrai que Netanyahou entretient depuis longtemps des relations très étroites avec le Parti républicain américain, je crois, au contraire, qu’il aurait préféré qu’Hillary Clinton soit la locataire de la Maison Blanche pour les quatre prochaines années. La raison de ce choix qui peut paraître de prime abord étonnant: Trump est un homme imprévisible. Or, pour Netanyahou, qui est un politicien conservateur, ce qui compte avant tout, c’est la stabilité”, explique Dan Illouz en entrevue depuis Jérusalem, ville où il travaille et vit depuis 2009.

L’actuel Premier ministre d’Israël n’aime pas les “changements trop drastiques”. Toutes les grandes réformes politiques qui portent son sceau ont été “mises en œuvre graduellement”, rappelle Dan Illouz.

“Donald Trump est un personnage trop imprévisible, qui change d’avis régulièrement. Il est indéniable que Benyamin Netanyahou, qui a toujours tablé sur la stabilité politique, aurait préféré comme partenaire Hillary Clinton, qui est plus prévisible, même s’il subsiste entre les deux de profonds désaccords sur diverses questions ayant trait au conflit israélo-palestinien. S’il est vrai que l’arrivée de Trump à la Maison Blanche pourrait s’avérer une grande opportunité pour Israël, celle-ci pourrait aussi exacerber les craintes des Israéliens dans la mesure où l’on ne sait pas encore à quoi s’attendre avec ce nouveau Président élu dont le côté “caméléon” est patent.”

Né à Montréal en 1986, Diplômé de l’École Maïmonide et de l’École Herzliah de Montréal, où il a obtenu son diplôme d’études secondaires, Dan Illouz est diplômé en Droit de l’Université McGill et détenteur d’une Maîtrise en politique publique de l’Université Hébraïque de Jérusalem. Il publie régulièrement ses analyses politiques dans divers journaux israéliens et canadiens, The Jerusalem Post, Yedioth Ahronoth, Israel Hayom, The Times of Israel, The Toronto Star, La Presse… Il commente aussi l’actualité politique israélienne et moyen-orientale sur la chaîne d’information continue israélienne I24News et la chaîne de télévision française France2. Il dirige actuellement une firme de consultation politique et stratégique qu’il a fondée il y a trois ans. Dan Illouz a fait son Aliya en 2009.

Ce fin décrypteur de l’actualité politique israélienne vient de publier A Free Nation in Our Land Une Nation libre sur notre Terre-, un recueil de ses analyses politiques publiées au cours des trois dernières années.

D’après Dan Illouz, le “facteur d’imprévisibilité” engendré par l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis va contraindre les acteurs du conflit israélo-palestinien à ne prendre aucun risque à court terme.

Par ailleurs, Benyamin Netanyahou veut d’ici le 20 janvier -date d’entrée en fonction du nouveau Président américain élu- éviter toute friction avec le Président sortant, Barack Obama.

Jusqu’à présent, Barack Obama et son Administration ont toujours défendu Israël à l’ONU et dans les autres organisations internationales. Au Conseil de Sécurité de l’ONU, l’Administration Obama a toujours opposé son veto pour empêcher qu’Israël ne soit condamné, particulièrement dans le sulfureux Dossier de la “colonisation” en Judée et Samarie et à Jérusalem-Est, reconnaît Dan Illouz

“Mais, on ne peut pas écarter le scénario noir d’un Barack Obama refusant que les États-Unis aient recours à leur droit de veto pour empêcher un lynchage d’Israël sur l’arène diplomatique internationale. Ce serait la revanche qu’attendait ce Président qui pendant ses deux mandats consécutifs a eu maille à partir avec Benyamin Netanyahou. Donc, du côté d’Israël, la prudence doit être de mise pour éviter toute nouvelle altercation avec l’Administration Obama d’ici le 20 janvier.”

Comme il l’explique exhaustivement dans son livre, Dan Illouz est convaincu que la “solution à deux États” est “morte et définitivement enterrée”.

“Le processus de négociation avec les Palestiniens n’est pas à la veille d’être relancé. Mahmoud Abbas a perdu toute sa crédibilité aux yeux des Palestiniens, et des Israéliens aussi. Désormais, à Gaza et dans les autres territoires palestiniens, c’est le Hamas qui mène et domine le jeu. L’heure est au réalisme et au pragmatisme. Il n’y aura jamais deux États indépendants, l’un israélien, l’autre palestinien, cohabitant pacifiquement côte à côte. Pour moi, la seule option réaliste et viable est le maintien du statu quo actuel. Cette option n’est pas aussi mauvaise, comme beaucoup de gens le pensent. Les Palestiniens bénéficient d’une certaine autonomie, ont leur propre parlement, leur propre police… La solution politique parfaite n’existe pas. Le statu quo est la seule solution, tout du moins à court terme. L’annexion par Israël des territoires de Judée et Samarie n’est pas non plus une option plausible. Celle-ci pourra être envisagée seulement si un jour les tendances démographiques sont favorables à Israël. On est loin d’être là!”