La magnifique saga marocaine de Jacques Levy

Jacques Levy

Natif de Casablanca, Jacques Levy vit en Suisse alémanique depuis quarante ans, à Meilen, une petite localité située à dix kilomètres de Zurich.

Ancien élève de l’ORT de Genève et diplômé de l’École d’Ingénieurs de Genève, ce spécialiste en Communication interculturelle et cinéaste chevronné -il a réalisé plusieurs documentaires et deux films consacrés aux Châteaux de la Loire- donne régulièrement des conférences dans de nombreux pays sur des thèmes relatifs à l’Histoire et à la littérature.

Consultant international en hôtellerie, Jacques Levy est professeur invité dans diverses écoles hôtelières (Lausanne, Montreux, Glion…). Il est aussi conseiller en stratégies d’entreprises.

Il est l’auteur de plusieurs livres sur le confort et la Communication.

Profondément attaché à son pays natal, le Maroc, et au riche héritage culturel sépharade que ses aïeux lui ont légué, Jacques Levy rend un vibrant hommage au terroir qui l’a vu naître et à sa lignée familiale dans un magnifique et très émouvant livre autobiographique paru dernièrement, En ce temps-là. Histoires et portraits. Récit.

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Ce très beau livre est en vente sur le site en ligne Amazon.

Dans En ce temps-là, Jacques Levy relate avec brio et un grand talent littéraire des épisodes marquants, et souvent cocasses, de la vie des membres de sa famille au Maroc.

Ce livre très captivant est constitué d’une trentaine de courts récits.

Jacques Levy narre le quotidien et les péripéties de personnages colorés et iconoclastes qui nous remémorent par moments les héros excentriques qui peuplent l’univers mythique, englouti par les vicissitudes de l’Histoire, du grand écrivain sépharade Albert Cohen.

Qu’est-ce qui a motivé Jacques Levy à dépeindre dans cette magnifique fresque littéraire le monde jadis disparu dans lequel sa fratrie a vécu depuis 1492, année de l’expulsion des Juifs d’Espagne par les Rois catholiques?

“Je suis très attaché au Maroc. J’y retourne régulièrement. Je suis allé récemment avec mes deux petits-fils, âgés de 21 ans et 15 ans. Je leur ai fait découvrir les lieux de mes racines à Casablanca. J’ai gardé d’excellents contacts avec des amis marocains musulmans. Bien que mon père était natif de Tanger et ma mère originaire de Larache, on parlait l’espagnol à la maison, moi j’ai toujours été un Casablancais invétéré”, raconte Jacques Levy en entrevue via Skype depuis sa résidence à Meilen.

Mais ce qui l’a le plus motivé à évoquer, sous forme de récits de vie, l’histoire des membres de sa famille à différentes périodes de l’Histoire du Maroc, c’est la “nostalgie d’un passé heureux”.

“Je tenais absolument à mettre en évidence ce passé heureux par rapport à la “propagande” qui existe aujourd’hui autour du judaïsme marocain. En effet, certains Juifs marocains -grâce à Dieu ils ne sont pas légion!- ne cessent de claironner que les Juifs vivaient malheureux au Maroc, qu’ils ont été forcés de quitter ce pays parce qu’ils étaient persécutés par les Arabes. C’est un tissu de mensonges, réplique Jacques Levy sur un ton catégorique. Il est vrai que les Juifs ont eu peur durant certaines périodes nationalistes mouvementées de l’Histoire du Maroc contemporain. Mais ces derniers ont été certainement embrigadés par les Madrihim venus d’Israël pour les encourager à faire leur Aliya. Les Juifs qui sont restés au Maroc vivent extrêmement bien et sont très bien considérés par les Musulmans marocains. Le Maroc est le seul pays arabo-musulman où le conseiller financier du Roi est un Juif, André Azoulay.”

Mais force est d’admettre que le Maroc s’est vidé de ses Juifs en l’espace de quelques décennies.

“C’est vrai, reconnaît Jacques Levy. Mais il y a aussi une autre vérité, malheureusement éludée. Beaucoup de Juifs marocains, particulièrement parmi ceux vivant en Israël, un pays qui ne les a pas accueillis très fraternellement, regrettent d’avoir quitté le Maroc. Plusieurs milliers de Juifs marocains, dont un grand nombre d’Israéliens, retournent chaque année dans leur pays natal, notamment pour prendre part aux célébrations des Hilloulot.”

Tout en étant toujours très attaché au Maroc, Jacques Levy ne ressent plus de nostalgie à l’égard de son pays natal.

“J’ai tué ma nostalgie pour le Maroc le jour où je suis retourné dans ce pays travailler pendant deux ans. J’étais déjà à la retraite. Un ami m’a demandé de l’aider à réorganiser une école de gestion qu’il a fondée à Casablanca. Je me suis alors frotté à la réalité du monde marocain avec des yeux d’adulte. La nostalgie que je portais en moi était celle de l’enfance. Quand j’ai revu le Maroc avec des yeux d’adulte, je me suis vite rendu compte que ce pays était une réalité bien différente de celle que j’avais imaginée dans mes songes nostalgiques. J’ai pris alors conscience que je n’éprouvais plus aucune nostalgie pour le Maroc et que je devais désormais composer avec une réalité et un passé réels.”

Jacques Levy est-il optimiste ou plutôt pessimiste en ce qui a trait à l’avenir du Séphardisme?

“Le Séphardisme est une forme de trésor que nous avons conservé pendant plus de cinq siècles dans la Diaspora. Je tiens à rappeler que les “vrais” Sépharades sont les descendants des Juifs bannis d’Espagne en 1492. Mais, aujourd’hui, le judéo-espagnol se meurt. Je suis le dernier de ma famille à parler encore cette judéo-langue vernaculaire. Mes frères et sœurs, plus jeunes que moi, comprennent le judéo-espagnol, mais ne le parlent pas. Je crains que cette langue et le fabuleux patrimoine culturel qu’elle colporte ne tombent peu à peu dans les arcanes d’un passé révolu. C’est lamentable!”