Le Regard sur les Juifs de Denise Bombardier

Denise Bombardier. [Photo: Stéphanie Lefebvre]

Le magnifique Dictionnaire amoureux du Québec de la réputée journaliste et écrivaine québécoise Denise Bombardier est un bijou littéraire que chacun devrait posséder dans sa Bibliothèque.

Publié dans l’excellente et prestigieuse Collection “Dictionnaire amoureux” des Éditions Plon, cet ouvrage très captivant, écrit par Denise Bombardier avec beaucoup de panache et de passion, qui s’adresse en premier lieu à tous ceux et celles qui en France et dans les autres pays de la Francophonie désirent découvrir ou en savoir davantage sur le Québec, nous présente cette “belle Terre de contrastes” sous tous ses angles et coutures. 

La lecture de ce très beau livre est une pure délectation.

On gambade avec entrain à travers les nombreuses entrées de ce Dictionnaire sans se lasser le moindrement. 

Ce livre est un cri d’amour au Québec et à ses habitants. 

Les nombreuses entrées composant ce Dictionnaire très enrichissant -“L’Accent”; “Les Anglophones”; “L’Île d’Anticosti”; “Les femmes québécoises”; “Jacques Cartier”; “L’effondrement du Catholicisme”; “Samuel de Champlain”; “Charlevoix”; “Le Cinéma québécois”; “Céline Dion”; “Hockey-Les Canadiens de Montréal”; “L’Humour québécois”; “Les Indiens”; “Les Inuits”; “La langue française”… “La Révolution tranquille”; “Le Saint-Laurent”; “Pierre Elliott Trudeau”; “Gilles Vigneault”…- nous présentent l’Histoire, les us et coutumes, les combats, les passions, les réalisations remarquables… du peuple québécois. 

“Ni Français, ni Américains, plus tout à fait Canadiens, les Québécois vivent au Canada et ont un esprit nord-américain, tout en restant très attachés à leur racines, en particulier grâce à leur langue, truffée de néologismes, d’anglicismes et d’ancien français”, explique Denise Bombardier.

Certains reprocheront à Denise Bombardier de ne pas avoir inclus dans ce Dictionnaire une entrée consacrée à l’“Identité québécoise”, au houleux  “Débat sur la Charte des valeurs”, qui a enfiévré la société québécoise l’année dernière, ou au célèbre écrivain anglophone montréalais Mordecai Richler, pourfendeur du nationalisme québécois. Ce Dictionnaire étant destiné essentiellement aux non-Québécois, Mme Bombardier a peut-être estimé qu’il n’était pas nécessaire de dédier quelques pages à ces sujets épineux et fort controversés.

L’auteure consacre une entrée aux “Juifs hassidiques de Montréal” (pp. 230-233). Communauté juive mal connue dont elle nous présente les principales spécificités. C’est grâce aux Juifs hassidiques que Denise Bombardier a découvert le Judaïsme et la culture juive. 

“J’ai été élevée dans le culte des Juifs que je croyais tous hassidiques. Deux tantes maternelles parlaient yiddish; ignorant le mot, elles disaient qu’elles parlaient “juif”. L’une et l’autre avaient travaillé pour des patrons Juifs, la première dans une manufacture de vêtements et la seconde en tant que bonne dès l’âge de douze ans. C’était dans une famille juive orthodoxe au début du XXe siècle, raconte Denise Bombardier. Ma tante avait adoré l’aïeule, une “femme intelligente, autoritaire”, qui elle-même s’était entichée de cette petite Canadienne-française néanmoins Catholique. Elle appréciait sa vaillance, son tempérament, son intelligence si vive qui lui avait permis d’apprendre rapidement le yiddish. Elle offrit donc à ma grand-mère de payer des études à ma tante, ce que celle-ci rejeta, insultée de se “faire faire la charité”. Jusqu’à la fin de sa vie, celle qui m’avait appris des mots yiddish, qui m’avait décrit le bonheur qu’elle avait ressenti en servant cette famille “pas Catholique mais mauditement généreuse” répétera qu’elle aurait souhaité être Juive. “Je ne serais pas une ignorante comme les Canadiens-français. J’aurais réussi dans la vie”, me disait-elle.”

Grâce à ses “expériences familiales”, le regard que Denise Bombardier porte sur les Juifs “a échappé aux stéréotypes” de sa culture catholique.

“Lorsqu’en classe on m’enseigna que c’étaient les Juifs qui avaient tué Jésus, je me souviens encore d’avoir levé la main. “Qu’avez-vous à dire, ma fille ?” demanda la Sœur. J’avais sept ou huit ans, et je m’entends encore répondre: “Mais Jésus était Juif. Donc ça veut dire que les Juifs ont tué un Juif, pas un Catholique”. La Sœur rougit et me gronda devant la classe. Ma tante aurait été fière de moi.”

Denise Bombardier consacre aussi une entrée fort savoureuse au “Bagel” -“bijou culinaire de la culture juive ashkénaze dont raffolent les Montréalais francophones et anglophones”, rappelle-t-elle- et une autre entrée tout aussi délectable à l’inégalable “Smoked meat” montréalais -“une des contributions des Juifs ashkénazes les plus partagées par l’ensemble des Montréalais”, écrit-elle.