Maroc-Israël normalisation ou rupture?

Des intellectuels et des personnalités publiques marocains, des Organisations juives internationales, dont le Centre Simon Wiesenthal et la Conference of Presidents of Major American Jewish Organizations, et plusieurs Gouvernements occidentaux ont dénoncé vigoureusement deux propositions de Loi visant à pénaliser fortement toute tentative de normalisation politique entre le Maroc et Israël. 

Ces vives protestations semblent s’être avérées efficaces puisque les Partis politiques qui ont savamment concocté ces Projets de Loi farouchement anti-­israéliens ont annoncé dernièrement qu’ils mettaient ceux-ci en sourdine.

En août 2013, des Députés Marocains, de la Majorité comme de l’Opposition, ont élaboré deux propositions de Loi pour interdire toute relation entre le Maroc et Israël.

Ces Projets de Loi prévoyaient entre 2 et 5 ans d’emprisonnement pour les “normalisateurs avec Israël” et des amendes pouvant atteindre 1 million de dirhams marocains (environ 1 million de dollars canadiens).

Les milieux islamistes et panarabistes marocains ont réussi à convaincre cinq Formations politiques siégeant au Parlement de Rabat d’avaliser ces deux propositions de Lois qui une fois adoptées incrimineraient toute normalisation avec Israël.

La première proposition de Loi a reçu le soutien de quatre Formations politiques de la Chambre des Repré­sen­tants du Parlement marocain: le Parti islamiste de la Justice et du Développement (P.J.D.), le Parti du Progrès et du Socialisme (P.P.S.) -ces deux Partis politiques forment la majorité parlementaire de l’actuel Gouvernement marocain, dirigé par le Chef du P.J.D., Abdelilah Benkirane-, l’Union Socialiste des Forces Populaires (U.S.F.P.) et l’Istiqlal -ces deux derniers Partis forment aujourd’hui l’Opposition officielle au Parlement de Rabat.

La deuxième proposition de Loi est une initiative du Parti Authenticité et Modernité (P.A.M.).

D’après Roger Pinto, Président du Mouvement SIONA, une Organisation vouée à la lutte contre l’antisémitisme et à la défense des minorités juives menacées ou persécutées dans le monde, dont le siège central est établi à Paris, le Maroc, qui a toujours été considéré par la Communauté internationale comme un “pays arabo-musulman très modéré et respectueux envers ses minorités », ne pouvait pas “promulguer une Loi scélérate” qui aurait “sensiblement terni son image sur la scène internationale”.

Le 11 décembre 2013, le Mouvement Siona a adressé à Chakib Benmoussa, Ambassadeur du Maroc en France, une lettre officielle de protestation contre ces deux Projet de Loi marocains anti-israéliens.

Jusqu’à ce jour, les Autorités de Rabat n’ont pas répondu à cette missive que leur a adressée le Mouvement SIONA.

“Les Autorités marocaines et le Roi du Maroc, Mohammed VI, ont certainement étaient très embarrassés par cette piteuse Affaire. Des personnalités publiques marocaines musulmanes, des Organisations juives nord-américaines et des hauts représentants diplomatiques de plusieurs pays occidentaux, notamment des États-Unis, ont fortement interpellé le Gouvernement marocain et le Roi Mohammed VI pour qu’ils fassent obstacle à la promulgation de ces Lois contre Israël.

L’adoption de ces Législations très discriminatoires aurait porté gravement atteinte à la réputation du Maroc, un pays qui a toujours été particulièrement respecté pour sa modération et sa grande tolérance à l’égard de sa minorité juive”, nous a dit Roger Pinto en entrevue.

Ce dernier déplore le “mutisme abyssal” affiché par les leaders des Organisations juives marocaines de la Diaspora face à cette “Affaire inquiétante, consternante et scandaleuse”.

“Comme d’habitude, les leaders des Communautés juives marocaines vivant dans la Diaspora ont préféré fermer les yeux et se taire devant cette disgracieuse Affaire. Leur attitude est déplorable. Nous comprenons très bien, pour des raisons évidentes, que les Juifs vivant au Maroc se terrent dans le silence. Ces derniers n’ont pas d’autre choix. Mais, ce qui est étonnant et très décevant, c’est le mutisme des leaders communautaires Juifs marocains chaque fois que les élites politiques marocaines fustigent Israël. Cette fois-ci, il s’agissait d’un cas gravissime: si ces Projets de Loi anti-Israël avaient été adoptés, on allait interdire l’entrée au Maroc aux Israéliens d’origine marocaine. Ce silence des leaders Juif marocains est troublant et incompréhensible”, dit Roger Pinto.

D’après Simon Skira, fondateur et Président de l’Association des Amitiés Maroc-Israël, Secrétaire Général de la Fédération des Juifs Marocains de France et Producteur d’un Documentaire sur le départ des Juifs du Maroc, Marocains Juifs: Destins contrariés, réalisé par le cinéaste marocain musulman, Younes Laghrari, ces deux Projets de Loi visant à sanctionner très sévèrement les normalisateurs des relations entre le Maroc et Israël “avaient peu de chances d’être avalisés et promulgués par le Parlement de Rabat”.

“Ces Projets de Loi devaient préalablement être examinés et approuvés par la Commission de la Justice et des Lois du Parlement marocain, Organe légi­sla­tif réputé pour être influencé par le pouvoir royal. Il ne faut pas non plus se leurrer. Depuis de nombreuses années, des relations étroites existent bel et bien entre les hautes sphères des pouvoirs marocain et israélien, bien que celles-ci ne soient pas toujours assumées, ni affichées. Par ailleurs, chaque année, environ 50000 touristes Israéliens d’ori­gine marocaine visitent le Maroc. Beaucoup d’entre eux viennent pèleriner les Tombeaux de leurs ancêtres et de figures rabbiniques du Judaïsme marocain. Mettre subitement fin au Tourisme en provenance d’Israël, ça aurait été une décision des plus insensées qui aurait eu indéniablement des répercussions très négatives sur l’Économie du Maroc”, explique Simon Skira en entrevue.

À l’occasion de la Fête de Trône, le Roi Mohammed VI décerne parfois l’Issam Alaouite, la plus haute Distinction civile octroyée par le Maroc, à des per­son­na­lités politiques ou publiques israéliennes originaires du Maroc. Parmi les lauréats de cette prestigieuse Distinction: Yehouda Lancry, ancien Ambassadeur d’Israël en France et aux Nations Unies; Shlomo Amar, ancien Grand Rabbin sépharade d’Israël… Les deux Projets de Loi anti-­Israël soumis au Parlement de Rabat auraient aussi “sanctionné” ce type de reconnaissance du Maroc à l’endroit de personnalités israéliennes natives du Maroc. Une situation qui aurait été très embarrassante pour les Instances royales marocaines.

 

Two bills forbidding relations between Morocco and Israel that have been introduced in the Moroccan parliament are raising concerns in many areas