Le Dr Samy Suissa un Épidémiologiste réputé

Dr Samy Suissa

C’est un chercheur réputé dans le domaine de l’Èpidémiologie, dont les travaux scientifiques sont reconnus internationalement, le Dr Samy Suissa, qui a été choisi par d’éminents épidémiologistes Canadiens pour diriger le nouveau Réseau Canadien pour l’Étude Observationnelle des Médicaments (R.C.E.O.M.) -Canadian Network for Observational Drug Effect Studies (C.N.O.D.E.S.)-. Ce Réseau de recherche pancanadien, dont le siège central a été établi à l’Hôpital Général Juif de Montréal, a obtenu dernièrement une subvention du gouvernement fédéral de 17,5 millions de dollars pour soutenir ses Recherches durant les cinq prochaines années.

Professeur de Médecine, d’Épidémiologie et de Biostatistiques à la Faculté de Médecine de l’Université McGill, le Dr Samy Suissa, qui a dirigé les Départements d’Épidémiologie de l’Hôpital Général de Montréal  et de l’Hôpital Royal Victoria, est actuellement le Directeur du Centre d’Épidémiologie clinique de l’Institut Lady Davis de Recherches médicales de l’Hôpital Général Juif de Montréal.

C.J.N.: Après avoir assumé des fonctions de Direction importantes à l’Hôpital Général de Montréal et à l’Hôpital Royal Victoria, qu’est-ce qui vous a motivé à poursuivre votre carrière de chercheur à l’Hôpital Général Juif?

Dr Samy Suissa: C’est Henri Elbaz, ancien Directeur général de l’Hôpital Général Juif,  qui m’a fortement encouragé à me joindre à la très dynamique Équipe de cette Institution médicale. Ce qui m’a aussi beaucoup motivé, c’est l’approche favorisée par l’Hôpital Général Juif: la Recherche médicale est une grande priorité. C’est pourquoi l’Hôpital Général Juif est aujourd’hui un leader au Canada et au niveau international dans le domaine la Recherche, particulièrement dans le créneau de la lutte contre le cancer. L’Institut Lady Davis a investi des fonds importants pour que le Centre d’Épidémiologie clinique de l’Hôpital Général Juif devienne un Centre de Recherche d’excellence de renommée internationale. Des chercheurs Américains, Français, Anglais, Hollandais… font partie de notre Équipe. Dès mon arrivée au Centre d’Épidémiologie clinique, j’ai recruté des chercheurs s’intéressant à l’Épidémiologie du cancer. Je les encourage à travailler de concert avec les chercheurs du Centre du cancer Segal de l’Hôpital Général Juif  afin de bâtir des ponts entre la Recherche fondamentale et la Recherche épidémiologique clinique. J’ai développé aussi des contacts étroits avec des chercheurs en Épidémiologie Israéliens qui travaillent pour Clalit, l’une des plus importantes Compagnies d’Assurance médicale israéliennes. Je pars dans quelques jours en Israël pour établir un partenariat plus concret avec cette Équipe d’épidémiologistes Israéliens.  Ma vision à plus long terme, c’est que le Réseau Canadien pour l’Étude Observationnelle des Médicaments pourrait devenir un Réseau international.

J’ai aussi des liens étroits avec l’Hôpital Général Juif pour des raisons personnelles. Quand j’ai immigré du Maroc au Canada avec ma famille à l’âge de 9 ans, l’Assurance médicale gratuite n’existait pas encore. Tous les Canadiens devaient payer pour consulter un médecin. Mes parents, qui venaient d’arriver au pays, n’avaient pas les moyens financiers pour rétribuer un médecin. On gravissait alors à pied la Côte-Des-Neiges -un exercice physique fort ardu durant les journées glaciales d’hiver- pour aller consulter gratuitement un médecin à la Clinique de ce qu’on appelait alors le “Jewish”. Quelques décennies plus tard, me voici de retour au “Jewish”! En guise de remerciements, je veux contribuer modestement à mon tour à l’essor de cette magnifique et généreuse Institution médicale qui m’a tellement donné et qui m’a toujours reçu les bras ouverts.

Canadian Jewish News: Quels sont les principaux Mandats du nouveau Réseau Canadien pour l’Étude Observationnelle des Médicaments (R.C.E.O.M.) que vous dirigez depuis quelques mois?

Dr Samy Suissa: Ce nouveau Réseau de Recherche pancanadien étudiera exhaustivement les effets à long terme de la prise de médicaments prescrits sur la santé des Canadiens. Le siège national du R.C.E.O.M. a été établi à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital Général Juif. Ce nouveau Réseau de Recherche national regroupe plus de 60 chercheurs d’Universités canadiennes, experts en Médecine, en Études épidémiologiques, en Pharmacie et en Biostatistiques. Sous ma direction, ces chercheurs chevronnés collaboreront à une série d’Études, étalées sur plusieurs années, qui auront pour but  de mesurer les effets réels des médicaments d’ordonnance sur les personnes qui les consomment. Bien que ces médicaments aient été approuvés pour usage public, il n’a pas été possible jusqu’ici de déterminer leur efficacité et leurs effets à long terme sur les personnes qui les prennent. Les Institutions membres du R.C.E.O.M. sont: l’Hôpital Général Juif, l’Université McGill, l’Université de Montréal, l’Université de Toronto, l’Université de la Colombie-Britannique, l’Université du Manitoba, l’Université Dalhousie, l’Université de Calgary et l’Université de Saskatchewan.

C.J.N.: Pour la première fois, ce nouveau Réseau permettra à des chercheurs en Épidémilogie travaillant dans des Institutions médicales et universitaires sises dans les différentes Provinces du Canada de partager leurs données et analyses sur l’innocuité de nombreux médicaments disponibles sur le marché.

Dr Samy Suissa: Jusque-là, le Canada ne disposait pas d’un Organisme national de Recherches épidémiologiques lui permettant de mener des Études suivies sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments en vente sur le marché. Un travail étroit d’Équipe permettra aux chercheurs associés au R.C.E.O.M. de déceler plus rapidement les risques des médicaments consommés par les Canadiens. On ne peut s’assurer de l’efficacité et de l’absence d’effets secondaires d’un médicament qu’après avoir effectué un examen approfondi de l’histoire médicale de millions de personnes qui utilisent ce médicament. Ces Études épidémiologiques majeures, effectuées auprès de larges échantillons de la population canadienne, permettront de prévenir de futurs décès et hospitalisations. D’après des Ètudes statistiques américaines, chaque année, environ 100000 Américains décèdent et 1,5 million sont hospitalisés à cause des effets secondaires causés par des médicaments. Nos Recherches épidémiologiques seront une source additionnelle importante de données probantes sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments après leur mise en marché qui permettra d’améliorer la santé et le bien-être des Canadiens.

C.J.N.: Les chercheurs du R.C.E.O.M. auront-ils accès à de nouvelles Bases de données?

Dr Samy Suissa: Pour réaliser leurs Recherches, les Équipes du R.C.E.O.M. auront accès à des Bases de données recelant les Dossiers médicaux anonymes de 20 millions de Canadiens et de 10 millions d’Anglais. Utilisant des méthodes de Recherche de pointe, les Équipes du R.C.E.O.M.  évalueront rapidement les risques et les avantages réels d’une kyrielle de médicaments consommés par les Canadiens, dans certains cas il y a plus de 30 ans. Toutes les données médicales sont traitées dans la plus stricte confidentialité puisque chaque personne n’est connue que par un code d’identification crypté que les chercheurs ne voient pas.

C.J.N.: Le R.C.E.O.M. fournira-t-il aux Autorités canadiennes en charge de la Santé publique des réponses plus claires et définitives sur les médicaments d’ordonnance?

Dr Samy Suissa: Oui. Le fait de coordonner étroitement les Recherches épidémiologiques à une échelle nationale permettra d’obtenir et de corroborer des résultats cliniques plus rapidement. En effet, en répétant une Étude dix fois, on aura une confirmation immédiate des résultats. Ce processus permettra aux instances gouvernementales chargées de la Santé publique de prendre une décision plus rapidement à un niveau pancanadien et de modifier certaines pratiques médicales.

Par exemple, une grande Étude clinique épidémiologique a démontré que certaines hormones utilisées pour traiter la ménopause pouvaient augmenter chez les femmes le risque de cancer du sein et avoir des effets cardiovasculaires très néfastes pouvant provoquer des infarctus. Cependant, cette Étude clinique épidémiologique ne pouvait pas confirmer si d’autres types d’hormones, par exemple les hormones synthétiques et le Patch, pouvaient avoir aussi des effets secondaires délétères. Une autre Étude clinique a été menée pour répondre à cette question lancinante. Celle-ci a démontré que l’utilisation d’ hormones ménopausales synthétiques et du Patch n’augmentent pas le risque de cancer du sein. Par contre, cette Étude a pu confirmer que les hormones orales étudiées étaient porteuses d’un risque de cancer du sein. Cette Étude a permis de rassurer des millions de femmes et de mettre au point de nouveaux traitements médicaux.

C.J.N.: Quelles sont les principales Études épidémiologiques qui seront menées par l’Équipe du R.C.E.O.M. au cours des prochains mois?

Dr Samy Suissa: La première grande Étude réalisée par les Équipes du R.C.E.O.M.  portait sur les statines, une classe de médicaments qui aident à réduire le taux de cholestérol en inhibant l’activité d’une certaine enzyme. Un faible pourcentage de patients reçoit des doses intentionnellement plus élevées de statines. Dans de rares cas, on soupçonne que ce type de traitement médical peut causer une insuffisance rénale. La première Étude du R.C.E.O.M. a exploré à fond ce risque potentiel. Les résultats de cette Étude seront prochainement publiés dans des Journaux scientifiques. Ils seront ensuite soumis à Santé Canada et à d’autres Organismes intéressés par cette Étude très rigoureuse.

Une deuxième grande Étude, que nous venons d’amorcer, tentera de déterminer si les Inhibiteurs de la Pompe à Protons (I.P.P.) -des médicaments extrêmement efficaces dans la réduction de la production d’acide gastrique- augmentent les risques de pneumonie grave.