Une entrevue avec Enrico Macias

Enrico Macias

Enrico Macias est ravi à l’idée de retourner prochainement à Montréal pour retrouver le public québécois qui lui est demeuré fidèle durant les cinquante-cinq années de son éclatante carrière artistique.

Le célèbre chanteur juif d’origine algérienne sera l’invité de marque du grand gala que la Congrégation Spanish & Portuguese organisera, le 10 mai, pour commémorer les 250 ans de cette institution cultuelle israélite, la plus vieille du Canada.

“J’ai une relation particulière, privilégiée et chaleureuse avec le public québécois. J’adore venir chanter au Québec”, nous a dit Enrico Macias en entrevue depuis Paris.

La première fois qu’il s’est produit au Québec, c’était en 1968.

“La vente des billets pour mon premier spectacle à Montréal ne marchait pas du tout. À l’époque, seulement les membres de la communauté juive marocaine établie à Montréal connaissaient mes chansons. Je n’étais pas connu du public québécois non-juif. La plupart des Juifs marocains montréalais ignoraient que j’étais de passage chez eux pour donner un spectacle. C’est lors d’une soirée privée, que des membres de votre accueillante et généreuse communauté avaient organisée en mon honneur, que le bruit de ma prochaine prestation musicale à Montréal s’est mis à circuler. La vente des billets pour mon récital a alors pris son envol. Des Juifs marocains ont invité des amis québécois non-juifs à venir voir mon spectacle. C’est ainsi que j’ai commencé à conquérir le magnifique public québécois, qui m’est resté fidèle jusqu’à aujourd’hui”, raconte Enrico Macias.

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Le chanteur qualifie de “parfaite et singulière” la relation qui le lie au public du Québec.

“Le rapport entre un artiste et son public doit être complètement authentique. Ce que les gens aiment chez moi, c’est ma sincérité et mon authenticité. Quand je dis que j’aime le Québec, les Québécois savent que je suis sincère.”

Durant sa prolifique carrière artistique, le chanteur a vendu plus de cinquante millions de disques.

À 79 ans, sa passion pour la musique et la scène ne s’est pas émoussée.

“La musique est mon adrénaline quotidienne. Je continue à chanter parce que je ne me vois pas faire autre chose dans la vie. Je suis tellement heureux quand je me retrouve devant mon public que si un jour je devais être contraint d’arrêter, pour des raisons de santé, la vie serait finie pour moi.”

Défenseur invétéré d’Israël et fervent partisan d’un rapprochement entre Juifs et Musulmans, Enrico Macias n’a cessé de prôner dans ses chansons la fraternité et la paix entre les peuples.

“La réconciliation entre les hommes qui se font encore la guerre aujourd’hui, j’y crois dur comme fer. Toutes les solutions concoctées par les hommes politiques pour rapprocher des peuples antagonistes ne pourront jamais être aussi efficaces que le remède miraculeux appelé “culture”. Le brassage des cultures permet à des personnes provenant d’horizons culturels différents de mieux se comprendre, de mieux se connaître et de mieux s’aimer. Très souvent on découvre ébahi un pays, et sa culture, en écoutant ses musiques. Je suis convaincu que la culture contribue à rapprocher les peuples et à favoriser un dialogue interculturel constructif.”

Le 28 mars dernier, Enrico Macias a participé, avec quelque 15 000 autres Parisiens, à la “marche blanche” organisée à la mémoire de Mireille Knoll, une octogénaire juive lâchement assassinée à son domicile par un islamiste.

La vague d’antisémitisme qui a déferlé sur la France ces derniers mois le bouleverse profondément.

“Je porte un regard dramatique sur les attaques abjectes dont des Juifs ont été victimes ces derniers temps en France. Je n’arrive pas à comprendre qu’il y ait encore de l’antisémitisme en France en 2018. Ça m’attriste et ça me révulse. Surtout après toutes les horreurs indicibles qui ont été commises pendant la Shoah. Je suis dévasté par cet antisémitisme barbare, qui n’est pas un phénomène nouveau. Depuis la nuit des temps, les Juifs ont été persécutés, pris en otage et massacrés sans relâche. Nous devons être constamment aux aguets car cette bête immonde qu’est l’antisémitisme sommeille toujours aux quatre coins du monde.”

“Optimiste lucide, mais résolu”, Enrico Macias est convaincu que le “Bien” triomphera un jour du “Mal”, car l’humanité finira par prendre conscience que seules la “fraternité” et la “paix” pourront sauver le monde et empêcher une hécatombe.

“Je suis conscient que ce qui se passe aujourd’hui dans le monde est un échec. Mais ça n’ébranle pas du tout mon idéal de fraternité et de paix. Tout au long de sa tumultueuse histoire, l’humanité a été confrontée à des moments très durs, souvent à saveur apocalyptique. Pourtant, elle a su rebondir. Ce sont de mauvais moments à passer. J’ai toujours eu confiance en la sagesse de l’homme et en sa capacité de résilience.”

Le gala du 10 mai de la Congrégation Spanish & Portuguese est coprésidé par deux leaders communautaires remarquables, Arlène Abitan et Ron Mashaal.

“Nous sommes très honorés qu’Enrico Macias chante au gala commémorant le 250e anniversaire de la Spanish & Portuguese. À cette occasion, nous rendrons hommage au passé extraordinaire de cette institution inclusive qui occupe une place particulière dans le paysage communautaire juif montréalais. La Spanish & Portuguese rassemble sous un même toit Sépharades et Ashkénazes dans un esprit fraternel et de solidarité”, nous a dit Arlène Abitan.

Le Rabbin Howard Joseph, ancien leader spirituel de la Congrégation Spanish & Portuguese, et son épouse, Norma Joseph, seront honorés lors de cette soirée.

Ce gala est organisé par la firme événementielle Concept Duo, codirigée par Katia et Serge Dahan.