‘L’ère de Netanyahou touche à sa fin’

Daniel Ben Simon

“L’ère de Benyamin Netanyahou touche à sa fin. La crise sociale sans précédent à laquelle Israël est confronté aura raison du Gouvernement le plus à droite et le plus néolibéral de l’Histoire d’Israël. La prochaine Coalition gouvernementale à la Knesseth, qui sera dirigée par Shaoul Mofaz, nouveau leader du Parti Kadima, sera composée de forces de centre-gauche. Le fanatisme politique et économique du Gouvernement Netanyahou, qui a accentué l’isolement d’Israël sur la scène internationale, a mené le pays au bord de l’abîme.”

Cette conjecture décapante a été formulée par l’ancien journaliste du quotidien Haaretz et actuel Député du Parti Travailliste à la Knesseth, Daniel Ben Simon, au cours de l’entrevue qu’il nous a accordée lors de son récent passage à Montréal. Cet entretien a eu lieu une dizaine de jours avant que le Premier ministre d’Israël, Benyamin Netanyahou, ne réussisse un coup de poker politique inopiné: l’Accord qu’il a conclu avec le Chef de Kadima, Shaoul Mofaz, pour constituer un Gouvernement d’union nationale.

D’après Daniel Ben Simon, le principal -adversaire de Benyamin Netanyahou n’est pas “une entité politique” mais les très nombreux Israéliens “profondément indignés” par “les politiques éco-no-miques sauvages et inhumaines” imposées par un “Gouvernement hypercapitaliste” à la classe moyenne et aux couches sociales les plus défavorisées d’Israël.

“C’est la Justice sociale qui évincera bientôt du pouvoir Benyamin Netanyahou. Ce dernier a berné la jeu-nesse israélienne et les centaines de milliers de citoyens Israéliens courroucés qui réclament des réformes concrètes sur le plan socio-éco-no-mique. Plus de 30% de Israéliens vivent sous le seuil de la pauvreté, rappelle Daniel Ben Simon. Les propositions formulées par la Commission Trajtenberg, mise sur pied par le Gouvernement Netanyahou pour apaiser la grogne sociale qui sévit dans le pays depuis plus d’un an, n’ont été qu’un subterfuge pour atténuer temporairement cette crise socio-éco-no-mique intenable, qui de-puis n’a fait que se dégrader. Les prochaines élections législatives israéliennes ne porteront pas sur la Sécurité nationale ou les enjeux de la menace nucléaire iranienne mais sur la Justice sociale. Aujourd’hui, en Israël, c’est le seul et véritable enjeu.”

L’idéologie économique “ultra-libérale” mise en oeuvre par le Gouvernement Netanyahou a eu des “conséquences désastreuses” sur les couches sociales les plus démunies d’Israël. La croissance éco-no-mique élevée de ces dernières années a entraîné une aggravation sans précédent de la pauvreté et la disparition progressive de la classe moyenne, soutient Daniel Ben Simon.

“Le mythe tenace de l’Israël égalitaire s’est effondré. Israël est passé d’une éco-no-mie très socialisante, qui jusqu’en 1985 avait la distribution des revenus la plus égalitaire des pays occidentaux, à l’économie la plus inégalitaire du monde occidental en termes de distribution des revenus. Les poches de pauvreté dans la société israélienne ne cessent de proliférer. Ça veut dire que la croissance économique dopée par la Haute Technologie n’a pas endigué l’appauvrissement de couches importantes de la population israélienne.”

D’après Daniel Ben Simon, l’idéologie économique “hyperlibérale” du Gouvernement Netanyahou a eu pour effet d’ “enrichir les plus riches” et d’“appauvrir les plus pauvres”.

“Israël compte aujourd’hui de nombreux millionnaires, et même des milliardaires. Pa-rallèlement, un nombre sans cesse croissant de pauvres vivent de l’aide publique et ont recours quotidiennement aux soupes populaires. La révolte sociale qui révulse Israël depuis l’été 2011 est un appel au retour aux valeurs d’éga-lité originelles du Sionisme. Quand je vais dans les villes de développement du Sud d’Israël, des septuagénaires aux abois me disent qu’ils regrettent les années 50, l’époque très noire des Makhbarot -les campements de fortune où les immigrants Sépharades furent parqués lors de leur arrivée en Israël. “En ces temps très ardus, le fléau du matéria-lisme était inexistant dans l’État d’Israël naissant. Nous n’avions rien, mais personne n’avait rien non plus. Or, aujourd’hui, l’écart entre les plus riches et les plus pauvres ne cesse de se creuser”, me lancent tout à trac ces Sépharades dépités.”

En 2011, le coût astronomique de la vie -d’après Daniel Ben Simon, 80% des ouvriers israéliens sont contraints de vivre avec un salaire d’environ 1200$ US par mois-, la flambée des loyers et du prix des maisons -d’après Daniel Ben Simon, à Tel-Aviv, le prix d’achat d’un appartement de 3 chambres est d’environ 2 millions de dollars US-… a provoqué la révolte du Front social. Plus d’un demi-million d’Israéliens sont descendus dans la rue pour dénoncer la vie chère.

Sur le Front social, l’été 2012 sera tout aussi chaud, prédit l’ancien éditorialiste du journal Haaretz.

“Les politiques économiques sca-breuses de Benyamin Netanyahou lui coûteront sa réélection au poste de Premier ministre d’Israël. La Justice sociale sera certainement le thème principal des prochaines élections israéliennes, qui devront avoir lieu à l’automne 2013 ou même avant. À ce chapitre-là, le bilan de Netanyahou est catastrophique. Chose certaine, les Israéliens ne sont plus dupes.”

Daniel Ben Simon, qui est membre de plusieurs Comités de la Knesseth -Économie, Finances, Immigration, Habitat et Affaires sociales- était de passage au Québec, en compagnie du Député du Parti Shass, le Rabbin Yitzhak Vaknin, à l’invitation de l’Assemblée Nationale du Québec.