À la mémoire d’un ardent ambassadeur de la culture sépharade, Solly Levy Z.’L.’

Solly Levy (à gauche) en compagnie du célèbre écrivain québécois Michel Tremblay. (Claire Levy photo)

Solly Levy s’est éteint à Toronto le 10 avril, à l’âge de 80 ans, après avoir combattu avec dignité et courage l’impitoyable maladie qui l’affligeait depuis plusieurs années.

Éducateur très dévoué et créateur culturel passionné, il a été l’un des plus fervents ambassadeurs de la culture sépharade au Québec et au Canada.

Durant sa longue carrière d’enseignant à l’École De Roberval, il a transmis avec entrain à ses nombreux élèves sa passion de la langue française et son amour du Théâtre. Chaque fois que l’on évoque son nom avec l’un de ses anciens élèves, il se souvient avec une vive émotion des pièces de théâtre mémorables, adaptations de grands classiques des littératures française et québécoise, que Solly Levy a mises en scène avec brio. Des productions théâtrales d’une grande qualité qui ont été pour de nombreux jeunes ayant eu la chance de côtoyer cet éducateur hors pair leur baptême d’acteur ou d’actrice sur les planches d’une scène. Plusieurs d’entre eux ont gardé un souvenir impérissable.

C’est le cas du célèbre humoriste et comédien Gad Elmaleh, qui a fait ses premiers pas sur une scène artistique en 1992 sous la direction de Solly Levy. Il interpréta le rôle de Mozus Benonfoirus dans la pièce “La Bsalade imaginaire”, une adaptation magistrale de Solly Levy en judéo-arabe du grand classique de Molière, “Le malade imaginaire”, présentée dans le cadre Festival Séfarad de Montréal.

“Solly Levy est un metteur en scène très exigeant qui m’a initié aux rudiments du métier d’acteur. Les conseils forts judicieux qu’il m’a prodigués m’ont grandement aidé dans la suite de ma carrière professionnelle. Quand j’ai rencontré ensuite des metteurs en scène très “tough“, je me suis dit : ce n’est rien à côté de Solly Levy, qui a toujours exigé de ses acteurs plus que de l’excellence », m’avait confié Gad Elmaleh au cours d’une entrevue à l’été 2016. 

Sa grande rigueur, son exigence incessante et son plein investissement dans tous les projets culturels qu’il entreprenait ont permis à Solly Levy d’exceller sur le plan artistique et d’atteindre des sommets.

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En 2017, à l’approche des célébrations du 100ème anniversaire de la Fédération CJA, l’institution centrale de la communauté juive de Montréal rendit un vibrant hommage sur une page Web à des personnalités éminentes de la communauté juive montréalaise ayant notoirement contribué à l’essor du Québec et du Canada dans divers domaines. On me demanda de brosser les portraits de personnalités sépharades s’étant particulièrement distinguées dans le domaine culturel au Québec et au Canada. Le premier nom qui émergea dans mon esprit fut celui de Solly Levy. Voici quelques moments marquants du parcours professionnel et artistique de ce Tangérois “pure laine” qui aimait profondément le Québec, sa langue, sa culture et ses écrivains —extraits du texte hommage que la Fédération CJA lui a dédié:     

“Enseignant, écrivain, comédien, metteur en scène de nombreuses pièces de théâtre, fondateur et directeur de deux Chorales musicales la Chorale Kinor de la communauté sépharade de Montréal et la Chorale liturgique Hallel Vezimra du Sephardic Kehila Centre de Toronto—, Solly Levy est un brillant créateur culturel.

Il a mis à profit ses nombreux talents pour tisser des liens entre la communauté juive de Montréal et la culture québécoise.

Il est un éminent spécialiste de la Hakétia, judéo-langue vernaculaire parlée jadis par les communautés juives qui vivaient dans les localités du Nord du Maroc, à laquelle il a consacré plusieurs livres. Il a été membre de l’ensemble musical Gerineldo, fondé en 1981 par Oro Anahory-Librowicz, spécialisé dans l’interprétation de la musique judéo-espagnole des communautés juives du Nord du Maroc.

Solly Levy a adapté en judéo-arabe et mis en scène plusieurs grands classiques de Molière et de dramaturges québécois et canadiens francophones renommés, dont Gratien Gélinas, Michel Tremblay et Antonine Maillet. Des pièces de théâtre hilarantes qui ont connu un grand succès.

Le travail théâtral et artistique de Solly Levy a grandement contribué à bâtir des ponts interculturels entre la communauté juive du Québec et les Québécois de souche francophone.

Au cours de sa carrière d’enseignant à l’École De Roberval de Montréal, il a mis en scène plusieurs classiques du théâtre québécois, dont la très populaire pièce “Ti-Coq” du réputé dramaturge Gratien Gélinas.

Michel Tremblay, Gratien Gélinas, Antonine Maillet et d’autres grands auteurs québécois ont assisté personnellement aux premières des adaptations de leurs oeuvres en judéo-arabe mises en scène par Solly Levy. Ils ont élogieusement encensé le travail théâtral de ce dernier.

Après sa carrière d’enseignant, Solly Levy a été jusqu’à sa retraite, en 1998, conseiller pédagogique auprès de la Protestant School Board of Greater Montreal.

En 2001, le prestigieux magazine français L’Express l’a désigné comme l’une “100 personnalités qui font bouger le Québec “.

En 2008, dans le film-documentaire Les Juifs du Québec: une Histoire à raconter, Solly Levy a interprété brillamment le rôle de Haïm, un vieux antiquaire juif qui raconte à une jeune Québécoise les 400 ans d’histoire de la communauté juive de Québec.

En 2014, il a été l’un des conférenciers de marque du Colloque international consacré aux langues judéo-espagnoles organisé par l’U.N.E.S.C.O. —Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture-, à Paris…”

Nous partageons pleinement avec son épouse Madeleine, ses enfants, Claire et Eddy, et les autres membres de sa famille leur peine immense.