“Baruch Spinoza était plus moderne que nous”

Frédéric Lenoir (Patrice Normand-Fayard Photo)

Banni, en 1656, à l’âge de 23 ans, de la communauté juive d’Amsterdam, à cause de son interprétation très critique des textes de la tradition juive, Baruch Spinoza était-il réellement un hérétique qui a trahi le judaïsme?

Le philosophe et sociologue Frédéric Lenoir répond à cette question des plus complexes dans un essai brillant, Le miracle Spinoza (Éditions Fayard), qu’il vient de consacrer à cet illustre philosophe, dont l’œuvre imposante est toujours d’une brûlante actualité.

Un livre fort captivant, et des plus éclairants, dans lequel Frédéric Lenoir retrace les moments charnières de la vie mouvementée de Spinoza et s’emploie à décomplexifier avec brio les grands concepts philosophiques ardus de cet esprit ingénieux, précurseur des Lumières et de nos démocraties modernes.

Si Spinoza est si actuel, c’est parce qu’il permet de rendre raison de phénomènes dont il n’avait, en son temps, pas la moindre idée, et qu’il peut, à cet égard, nous aider à mieux les comprendre aujourd’hui.

“La pensée de Spinoza est très actuelle car elle nous permet de penser le monde contemporain tout en nous proposant des voies lumineuses à sillonner pour l’améliorer”, nous a dit Frédéric Lenoir au cours de l’entrevue qu’il nous a accordée lors de son récent passage au Québec.

Frédéric Lenoir est l’un des philosophes les plus populaires de France.

Cofondateur de la fondation SEVE (Savoir Être et Vivre Ensemble) et fondateur de l’association Ensemble pour les animaux, il est l’auteur de nombreux ouvrages, traduits en une vingtaine de langues, qui ont connu un grand succès. Notamment: Du bonheur, un voyage philosophique (Éditions Fayard-LGF); La puissance de la joie (Éditions Fayard); Philosopher et méditer avec les enfants (Éditions Albin Michel); Lettre ouverte aux animaux (et à ceux qui les aiment) (Éditions Fayard).

Entretien à bâtons rompus avec un philosophe farouchement spinoziste.

 

Pourquoi la vie et l’œuvre de Spinoza vous passionnent-elles?

Je suis “tombé en amour”, comme on dit au Québec, avec Spinoza. Comme son œuvre est très difficile à lire, j’ai eu à cœur de la rendre le plus accessible possible dans ce petit livre, en essayant d’expliquer ses grands concepts philosophiques. Des concepts clés qui peuvent aider beaucoup de gens à vivre. De grands génies dans l’histoire de l’humanité, Goethe, Einstein, Nietzsche, Freud, ont reconnu à quel point Spinoza avait changé leur vie. Je pense que la lecture des œuvres de Spinoza peut aider beaucoup de gens à regarder les choses autrement, avec un regard neuf. Quand je poursuivais mes études en philosophie, il y a trente ans, on n’étudiait pas du tout Spinoza. On le citait en passant. Aujourd’hui, il est revenu beaucoup plus en force. Il est au programme du baccalauréat en France. Il y a une redécouverte de son œuvre depuis une dizaine d’années.

Spinoza a édifié très jeune, dès l’âge de 20 ans, une œuvre philosophique révolutionnaire.

Absolument. S’il y a un miracle qu’on aimerait démasquer par une juste connaissance des causes, c’est bien le miracle Spinoza! Comment cet homme a-t-il pu, en moins de deux décennies, édifier une construction intellectuelle aussi profonde que révolutionnaire? La pensée de Spinoza constitue une véritable révolution politique, religieuse, anthropologique, psychologique et morale. En prenant la raison pour seul critère de la vérité, ce philosophe iconoclaste, plus moderne que nous, se place d’emblée dans l’universel et l’intemporel, car cette raison est la même pour tous les hommes de tous les temps. C’est pourquoi son message n’a rien à craindre de l’usure du temps. Dans son système philosophique, Spinoza place la raison au centre de tout. Il est convaincu, et tentera de le démontrer, que la totalité du réel —des lointaines galaxies au cœur de l’être humain—est régie par des lois immuables, qui expliquent tous les phénomènes. Convaincu que la raison est capable d’appréhender les mécanismes qui nous déterminent, il propose une voie de libération fondée sur une observation minutieuse de nous-mêmes, de nos passions, de nos émotions, de nos désirs, de notre constitution physique, qui, seule, nous rendra libre.

C’est un philosophe difficile à classer.

Tout à fait. Spinoza met mal à l’aise un bon nombre d’universitaires parce qu’il y a dans son œuvre une dimension spirituelle très forte. On le classifie facilement soit comme un auteur totalement matérialiste, soit comme un auteur spiritualiste. Je crois qu’il est les deux à la fois. Toute la complexité du système philosophique forgé par Spinoza réside dans le fait qu’on ne peut pas le ranger dans des cases. Il est très complexe. Moi, ce que j’aime chez Spinoza, c’est sa grande subtilité. Il est dur à appréhender pour beaucoup d’intellectuels. C’est pour cette raison qu’il nous met toujours mal à l’aise.

Pourquoi Spinoza est-il si en vogue aujourd’hui?

Spinoza est de plus en plus actuel pour plusieurs raisons. La première: il réconcilie l’éthique et le politique. Encore aujourd’hui, on a tendance à dissocier ces deux notions fondamentales. D’un côté, il y a des morales, et de l’autre, il y a la vision politique moderne, en vigueur dans nos démocraties. Spinoza a été le pionnier du politique moderne, puisqu’il a été le premier philosophe à définir le meilleur système politique, en l’occurrence la démocratie, qui sépare le politique du religieux et garantit la liberté de conscience et d’expression. À bien des égards, Spinoza est non seulement très en avance sur son temps, mais aussi sur le nôtre.

Mais, il va plus loin lorsqu’il nous dit que les démocraties ne fonctionneront pas bien tant qu’il y aura des passions tristes et que les individus seront tenaillés par la peur, le ressentiment, la jalousie, qui engendreront toujours de l’injustice et de la violence dans nos sociétés. La crise qui sévit aujourd’hui dans nos démocraties donne entièrement raison à Spinoza. La peur du gendarme et la loi ne suffisent pas pour rétablir l’ordre et l’harmonie. Il est convaincu que les individus doivent se métamorphoser intérieurement pour être vertueux. Il faut amorcer un travail intérieur pour aller vers la joie, c’est-à-dire pour s’accomplir et pour passer des passions tristes aux passions joyeuses afin que les sociétés se portent mieux. Le lien entre l’éthique et le politique établit par Spinoza est extrêmement actuel.

Très nombreux sont ceux qui reprochent à Spinoza d’avoir trahi le judaïsme.

Ce serait un très mauvais procès de penser que, par une sorte de haine de lui-même et de ses origines, Spinoza n’a réservé ses flèches qu’au judaïsme. Il critique avec la même force toutes les religions lorsqu’elles activent les passions tristes des individus, notamment la peur, pour mieux les asservir; lorsqu’elles se détournent de leur unique vocation —favoriser le développement de la justice et de la charité par le biais de la foi— pour distiller la haine de l’autre et l’intolérance; lorsque les croyants font preuve d’hypocrisie ou se croient supérieurs aux autres. C’est tout cela que Spinoza dénonce vigoureusement dans toutes les religions. Il critiquait férocement aussi bien le judaïsme, que le christianisme ou l’islam. Chaque fois qu’il évoque l’islam, c’est pour faire une virulente critique de la confusion des pouvoirs temporel et spirituel que cette religion entretient.

Un de ses contempteurs était nul autre que l’une des plus éminentes figures de la philosophie du XXe siècle, Emmanuel Levinas.

J’ai eu comme professeur le grand philosophe et talmudiste Emmanuel Levinas, que j’ai bien connu à la fin de sa vie. J’ai collaboré avec lui à la rédaction d’un livre. Dans un texte accusateur datant de 1956 —Le cas Spinoza (publié dans son livre Difficile liberté, Éditions Albin Michel, 1963)—, Levinas entend expliquer en quoi Spinoza porte une lourde responsabilité dans le développement de la pensée antijuive.

D’après Levinas, Spinoza s’est auto-excommunié du judaïsme parce qu’il a fait une interprétation de la religion qui n’était pas du tout compatible avec le judaïsme, dans la mesure où il nous dit que l’observance de la loi est inutile. Or, si vous dites à un Juif religieux que l’observance de la loi est inutile, alors, à ses yeux, il ne reste plus grand-chose du judaïsme. Pour Spinoza, la loi juive est un ensemble de décrets divins inscrits au fond du cœur. Donc, une fois qu’on suit la raison naturelle, on n’a plus besoin de la religion. Dans son propre cas, le judaïsme n’était pas qu’une religion, mais également une appartenance culturelle à sa communauté, d’origine marrane, qui pendant longtemps a été contrainte de pratiquer sa foi en catimini. Cet héritage familial, socio-historique et culturel l’a construit aussi. Spinoza est profondément Juif tout en ayant pris une distance intellectuelle avec la religion juive. C’est pourquoi, depuis 350 ans, la pensée de Spinoza est une pierre d’achoppement dans le judaïsme. Pour faire très court, on pourrait dire que les Juifs religieux n’aiment pas Spinoza et que les Juifs laïcs l’adorent.

Ses origines familiales ont-elles contribué à façonner son esprit intellectuel et philosophique?

Certainement. Dans son premier livre, Le Traité théologico-politique, Spinoza dénonce, entre autres, la collusion entre la religion et le pouvoir politique, dont ses ancêtres ont été victimes. En effet, ces derniers ont subi dans leur chair les affres effroyables de l’Inquisition en Espagne puis, plus tard, au Portugal, pays qu’ils ont été obligés de quitter pour s’établir temporairement en France avant de s’installer définitivement aux Pays-Bas, un des rares lieux où on tolérait la pratique du judaïsme.

Les Pays-Bas étaient une terre d’asile pour ceux qui fuyaient les persécutions politiques et religieuses. Bien que majoritairement calvinistes, les Hollandais toléraient la présence de nombreuses sectes protestantes, des Catholiques et des Juifs. Même si elles étaient parfois réprimées, les opinions politiques et philosophiques les plus diverses pouvaient s’y déployer mieux que partout ailleurs en Europe. Dans l’histoire familiale de Spinoza, il y a beaucoup de souffrances liées à la collusion entre le religieux et le politique, ce qui a donné naissance à une forme de tyrannie où l’on persécute certains cultes. Je crois que son désir de liberté de conscience et d’expression émane de son passé familial ardu. Il rappelait sans cesse que son Traité théologico-politique, livre qui a marqué son temps, était un manifeste pour la liberté de conscience. Toute son histoire familiale tumultueuse est derrière ce livre.

Le vent de liberté qui souffle sur la jeune république des Pays-Bas sera déterminant dans son parcours intellectuel.

Vers la fin du XVIe siècle, la république des Provinces-Unies des Pays-Bas, fondée en 1581, après s’être émancipée de la tutelle de l’Espagne, accueille des milliers de Juifs provenant des quatre coins du monde, notamment d’Italie. Ces derniers apportent une forme de renouveau au judaïsme, qui est très fort du temps de Spinoza. Des érudits juifs contribuent notoirement au développement des pensées intellectuelle et scientifique. Amsterdam, c’est aussi l’endroit où Descartes a vécu et où va naître la philosophie moderne. Des philosophes et des penseurs protestants libéraux véhiculent les nouvelles idées cartésiennes. C’est dans ce terreau que vont émerger les Lumières européennes, dont Spinoza est sans doute le plus éminent représentant.

Étonnamment, Spinoza ne s’est jamais défini comme athée.

Chaque fois qu’on l’a accusé d’être athée, il a rejeté vigoureusement ce grief. Il expliquait alors pourquoi il ne se considérait pas athée. Au fait, à son époque, “athée” signifiait libertin, sans loi. Spinoza répliquait qu’il avait une morale très stricte et qu’il était un homme ayant de profondes valeurs. Il s’est toujours défendu de cette accusation d’immoralité.

Spinoza a fondé entièrement son système philosophique sur Dieu. Si vous lisez son livre L’Éthique, la première partie est consacrée à Dieu et la dernière à la béatitude et à l’amour de Dieu, qui est omniprésent dans sa pensée. Mais le Dieu de Spinoza n’est pas celui de la Bible.

À la fin de mon livre, j’ai un débat sur cette question épineuse avec le philosophe Robert Mizrahi, l’un des plus éminents spécialistes de l’œuvre de Spinoza. Nous sommes en désaccord sur la question de Dieu dans la pensée spinoziste. Robert Mizrahi est convaincu que Spinoza était foncièrement athée parce qu’il ne croyait pas au Dieu de la Bible. Il est vrai qu’on peut considérer Spinoza comme athée si on part du postulat que le seul Dieu possible est celui de la Bible. Mais, pour Spinoza, il n’y avait pas que le Dieu de la Bible, une autre conception de Dieu était aussi possible. C’est celle qu’il développe dans L’Éthique, c’est-à-dire la substance infinie qui porte le monde, on pourrait même dire la Nature, avec un N majuscule: la totalité du réel. Il redéfinit complètement le concept de Dieu d’une manière qui nous rapproche beaucoup du taoïsme et de l’hindouisme. Le Dieu immanent de Spinoza ressemble beaucoup au Dieu célébré dans ces traditions de l’Orient.

Paradoxalement, vous expliquez que tout en exécrant les religions, Spinoza n’aurait jamais pu forger sa pensée philosophique sans l’apport de celles-ci.

La religion, c’était son terreau. Elle n’a cessé de nourrir sa pensée philosophique. Il connaissait par cœur la Bible, en hébreu. Il a appris à penser avec la Bible et le Talmud. Mais, il a utilisé la raison pour mettre de la distance par rapport à l’interprétation religieuse traditionnelle de la Bible. Cette distance l’a amené jusqu’au Herem, le bannissement de sa communauté, parce que son interprétation des textes de la tradition juive était radicalement différente de celle des Rabbins. Il prend ainsi une liberté extraordinaire. C’est ce qui me fascine chez Spinoza. Il est un esprit libre, rien ne peut contraindre son jugement. Il a donné naissance, à partir du terreau de l’interprétation textuelle biblique, à une intelligence extraordinaire capable de tout critiquer et analyser avec une grande subtilité. Il a toujours entretenu un rapport compliqué avec la religion.

Vous lui reprochez d’avoir “sous-estimé le rôle précieux que joue la religion en créant des “communions humaines”, formule que vous empruntez à votre ami, le philosophe Régis Debray.

Spinoza a une approche intellectuelle et très rationnelle des choses, et particulièrement de la religion. Il affirme, sans ambages, que la religion est d’abord fondée sur la peur, c’est pourquoi nous avons besoin de croire en un être supérieur qui nous protège constamment. Il procède à une déconstruction très rationnelle de la religion.

Mais, il a oublié une dimension fondamentale de la religion: à savoir qu’elle crée des communions humaines, c’est-à-dire un sentiment d’appartenance, très puissant chez les êtres humains. On a tous besoin de se sentir enracinés dans un lieu ou dans un groupe. La religion crée un lien social. Spinoza voulait s’affranchir de ce lien social et de sa communauté. Il vit au XVIIe siècle. Il est le premier philosophe des Lumières. Il aspire à une universalité qu’il pensait qu’on ne peut atteindre qu’en se détachant de ses appartenances religieuses ou communautaires. Il voulait absolument devenir citoyen du monde par la raison. C’est une dimension très élitiste que très peu de gens peuvent vivre. La grande majorité des êtres humains ont besoin pour s’épanouir de se sentir enracinés dans une communauté. Je pense que cette dimension religieuse existera toujours parce qu’elle crée un lien affectif entre les gens. Spinoza a sous-estimé ce besoin fondamental pour tout être humain.

Sa position sur le christianisme était des plus étonnantes.

Tout à fait. Spinoza a une position des plus originales et des plus singulières sur le christianisme. Il a toujours dit très clairement qu’il n’adhérait pas au dogme chrétien. Il n’a jamais songé à se convertir au christianisme, en dépit des pressions très fortes dont il a été l’objet de la part d’amis chrétiens qui le poussaient à le faire. Il n’a jamais voulu se convertir au christianisme parce qu’il se considérait comme non religieux. Par contre, son point de vue sur le Christ est extrêmement original parce qu’il diffère fortement des points de vue chrétien et juif sur cette question.

Il estimait que Jésus était le seul prophète à ne pas avoir été influencé par son imagination, dont les paroles étaient empreintes de vérité. Pour Spinoza, Jésus était l’émanation de la sagesse divine. Donc, il en a fait le prophète des prophètes, le plus éclairé et le plus apte à clamer les vérités divines éternelles. Mais, en même temps, il récusait l’idée, promue par les Chrétiens, que Jésus était le fils de Dieu et la deuxième personne de la Sainte-Trinité. Il ne croyait absolument pas à l’histoire de la Sainte-Trinité. Tout en rejetant le dogme chrétien, il considérait Jésus comme le personnage le plus important de l’histoire humaine et le prophète le plus éclairé par Dieu.

Quel est l’aspect de la philosophie de Spinoza dans lequel vous vous êtes immédiatement reconnu?

Sa conception de l’éthique. Il propose une éthique qui n’est pas une morale du devoir écrasante, culpabilisante, mais, au contraire, une éthique fondée sur l’accomplissement de soi et la recherche de la joie. L’éthique de Spinoza est beaucoup plus motivante que celle de Kant. Son éthique parle à nos contemporains. Spinoza est d’une très grande modernité dans la manière dont il conçoit le lien entre le corps et l’esprit. Cette conception est très liée à son judaïsme. Il ne sépare pas, comme le font Platon, les Grecs et les Chrétiens, l’âme et le corps. Pour lui, le corps et l’esprit sont indissociables. À ses yeux, le corps est très important. Il le revalorise dans la tradition occidentale. Pour lui, le corps et l’esprit fonctionnent toujours ensemble, il ne faut pas les séparer parce que c’est dans cette alliance entre les émotions et la raison que l’être humain peut s’accomplir.

Spinoza vous a initié à une philosophie préconisant le bonheur et la joie, dont vous êtes devenu l’un des plus ardents promoteurs.

Sans aucun doute. L’intuition de Spinoza est fondamentale. À savoir que tout être, tout organisme vivant, fait un effort pour persévérer et grandir dans son être —le fameux conatus—. Chaque fois que nous grandissons nous sommes dans la joie, chaque fois que nous régressons nous plongeons dans la tristesse. L’éthique de Spinoza ne repose pas, comme c’est le cas dans la morale traditionnelle, sur une maîtrise du corps et des passions par la volonté et la raison, donc par l’esprit. Pour Spinoza, l’esprit et le corps forment une seule et même chose. Son éthique repose sur le passage de la tristesse à la joie. Pour lui, ce qui est le sens de la vie humaine, c’est véritablement d’être de plus en plus dans la joie, jusqu’à atteindre la joie suprême, qu’il appelle “la béatitude”. Là, il reprend un vocabulaire religieux.

Sa conception de l’éthique est d’une grande originalité. Aucun autre philosophe avant lui n’avait construit une morale basée sur la joie. Spinoza a été le premier philosophe à nous dire: ne fondons pas l’éthique sur la maîtrise des passions, comme le fera plus tard Kant, et sur le devoir, c’est-à-dire sur un impératif catégorique, mais fondons-la sur la recherche de la joie puisque c’est ce qui permet à un être humain de grandir en humanité.