Les enjeux économiques d’un retrait du Golan

Un retrait d’Israël du plateau du Golan, si Jérusalem et Damas parviennent à conclure un accord de paix, aurait-il des incidences négatives sur l’économie israélienne?

Du tourisme, du vin et de l’eau, c’est l’essentiel de l’activité économique du plateau du Golan. L’importance économique du Golan reste marginale: 0,5%. C’est la contribution du Golan au PIB -Produit Intérieur Brut- israélien, soit un peu moins d’un milliard de dollars par an, rappelle l’économiste franco-israélien Jacques Bendelac.

“Si le débat public se focalise aujourd’hui sur les aspects géopolitiques du plateau du Golan, son enjeu économique mérite aussi de retenir l’attention des observateurs. La restitution du Golan à la Syrie dans le cadre d’un traité de paix serait loin d’entraîner des conséquences vitales pour l’économie israélienne”, estime ce spécialiste des questions économiques israéliennes et moyen-orientales.

Le plateau du Golan reste faiblement peuplé, les Juifs y sont minoritaires. Quelque 40000 personnes vivent actuellement sur les 1200 kilomètres carrés du Golan: 19000 Druzes, 18000 Juifs et 3000 Musulmans. Au total, c’est donc 0,6% de la population israélienne qui vit aujourd’hui sur le Golan syrien, occupé par Israël lors de la Guerre des Six Jours de 1967, précise Jacques Bendelac.

Les Juifs vivent dans une seule ville du Golan, Katzrin, forte de 6500 habitants, ainsi que dans les 32 kibboutzim et mochavim du plateau. Les Druzes vivent dans quatre villages (Majdal-Shams, Boukata, Massada et Ein-Kenya), alors que les Musulmans sont regroupés dans la localité d’Adjar.

L’économie du Golan est concentrée sur le tourisme, l’agriculture et l’industrie, qui emploient au total 5000 salariés. Le tissu économique comprend 700 exploitations agricoles, 200 services touristiques, 180 commerces et 25 entreprises industrielles.

L’agriculture est la principale activité économique du Golan. Les terres cultivées produisent une grande variété de fruits et de légumes. Les élevages fournissent des produits laitiers et de la viande. Certains produits agricoles ont réussi à conquérir une part importante du marché israélien.

Les pommes (30000 tonnes par an) fournissent 30% des besoins nationaux israéliens, les poires (10000 tonnes par an) assurent 41% des besoins nationaux, les cerises (600 tonnes par an) couvrent 50% de la consommation nationale et les mangues (7000 tonnes par an) garantissent 32% de la consommation nationale.

Dans l’industrie agroalimentaire, le maïs industriel (20000 tonnes par an) fournit 23% de la consommation nationale, la viande de bœuf (12000 têtes par an) couvre 40% de la consommation nationale, le lait (66 millions de litres par an) comble 6% de la consommation annuelle de lait des Israéliens.

L’industrie agroalimentaire du Golan enregistre aussi à l’étranger d’importants succès avec des produits phares qui ont fait sa réputation au-delà des mers. Il s’agit notamment des vignobles de The Golan Heights Winery Ltd., qui fournissent, depuis 1983, des vins de renommée internationale sous les marques Yarden, Gamla et Golan. Aujourd’hui, les vignes du Golan fournissent 18% de la consommation locale de vin et 38% des exportations israéliennes de vin.

Autre réussite agroalimentaire: l’exploitation des eaux naturelles, abondantes sur les hauteurs du Golan. Fondée en 1980, l’entreprise d’eau minérale Mei Eden fournit aujourd’hui près de 50% de la consommation des Israéliens. Mei Eden a étendu ses activités en Europe sous la marque Eden Springs. En 2003, cette marque a fusionné ses activités avec le géant agroalimentaire Danone, ce qui lui permet aujourd’hui de vendre ses eaux minérales dans 18 pays européens.

Les autres industries, situées dans l’une des trois zones industrielles de la région, comprennent des entreprises d’électro-optique, des petites usines de produits plastiques, sans compter les kibboutzim, qui ont créé leurs propres industries.

Au fil des années, le tourisme est devenu une des activités les plus dynamiques du Golan. Il y a trois sites touristiques très cotés: les eaux chaudes de Hammat Gader, les sources du Banyas et, en hiver, les pistes enneigées du Mont Hermon. Les kibboutzim ont développé toute une infrastructure de chambres d’hôtes qui accueillent chaque année des milliers de visiteurs, israéliens et étrangers.

Les ressources en eau constituent un argument de poids pour les partisans du maintien de la présence israélienne sur le Golan, note Jacques Bendelac.

“En effet, 50% des eaux qui alimentent le lac de Tibériade trouvent leurs sources sur les hauteurs du Golan et au Liban. Or, le lac devient progressivement déficitaire et il ne contribue plus qu’à 20% de la consommation d’eau d’Israël.”

D’après Jacques Bendelac, l’importance économique du plateau du Golan est marginale pour l’économie israélienne, même, reconnaît-il, si “un retrait causerait une perte économique pour certains secteurs d’activité”.

“Reste à savoir si la paix n’en vaut pas le prix”, renchérit-il.

Économiste, enseignant et chercheur, Jacques Bendelac a enseigné l’Économie dans des universités françaises et israéliennes. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, articles et travaux de recherche sur les économies israélienne et palestinienne. Ses recherches actuelles portent sur la société civile en Israël. Dernier ouvrage publié: Les Arabes d’Israël (Editions Autrement, Paris, 2008).

Jacques Bendelac signe une rubrique hebdomadaire dans le Site Internet officiel de la Chambre de Commerce France-Israël, Israël Valley: www.israelvalley.com

Israeli economist Jacques Bendelac discusses the economic consequences of an Israeli withdrawal from the Golan Heights.