“La poudre aux yeux” un roman de Joseph Elfassi

Joseph Elfassi [Michel Paquet photo]

Bromance apocalyptique” est le terme employé par le journaliste Joseph Elfassi pour définir son deuxième roman, La poudre aux yeux, paru récemment aux Éditions Stanké.

Bromance est un terme désignant un lien émotionnel fort entre deux amis. Une relation coriace au goût de fin du monde. Les deux personnages principaux de mon roman, Raphaël Cohen et Maxime Tremblay, incarnent le drame d’une génération désarçonnée, obnubilée par l’appât du gain et les plaisirs les plus débridés. Welcome to Apocalypse Now… version 2.0! “, lance, sur un ton goguenard, Joseph Elfassi en entrevue.

Né à Boston en 1986, Joseph Elfassi a grandi à Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue.

Détenteur d’un baccalauréat en journalisme de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), il a été recherchiste, rédacteur, chroniqueur culturel, photographe, vidéaste et monteur auprès de divers médias montréalais. Il a collaboré notamment à Vice Magazine, à l’hebdomadaire culturel Voir, et a travaillé à la Télévision francophone de l’Ontario (TFO) et à l’Office national du film du Canada (ONF). Il est actuellement le rédacteur en chef du bulletin de nouvelles de fin de soirée de la chaîne de télévision V et tient un blogue culturel sur le site Web de la chaîne de télévision Ici Artv.

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La poudre aux yeux est le deuxième opus d’une trilogie initiée, en 2016, avec Le Prix de la chose (Éditions Stanké).

L’histoire se déroule la veille de la tenue d’un troisième référendum sur la souveraineté du Québec. Les Canadiens de Montréal ont de fortes chances de remporter en finale la Coupe Stanley grâce à leur joueur étoile, un hockeyeur musulman fort controversé. Raphaël Cohen et Maxime Tremblay, deux producteurs de contenus vidéos, déjantés, pensent pouvoir enfin mener à terme leurs projets médiatiques démesurés grâce à un sésame inattendu qu’ils doivent désormais gérer: un budget illimité, qui leur permettra de démontrer pleinement leur talent professionnel…

“Raphaël Cohen et Maxime Tremblay ont, pour la première fois, accès à des ressources budgétaires illimitées alors que, jusque-là, ils étaient contraints d’opérer professionnellement avec une précarité financière. En se retrouvant avec des fonds illimités, ils sont résolument convaincus qu’ils pourront réaliser leurs rêves de créations audiovisuelles les plus fous. Ils déchantent très vite! Ils aboutissent effarés à la dure conclusion que riches ou pauvres ils sont amenés à commettre les mêmes erreurs et les mêmes conneries! Ils caressaient l’espoir que les choses deviendraient meilleures. Mais, rapidement, cet ardent espoir est dilué par la réalité”, explique Joseph Elfassi.

Juif sépharade, Raphaël Cohen est certainement l’un des personnages les plus excentriques de La poudre aux yeux.

“Raphaël Cohen est un peu déconnecté de ses propres émotions. Il a de grandes ambitions en matière de création médiatique, mais il constate que, généralement, sa propre médiocrité lui joue souvent de vilains tours. Il est dans la frustration permanente, voguant entre ses ambitions irréalistes et la réalité de sa vie, moins que satisfaisante.”

À travers le personnage controversé d’un joueur de hockey musulman, Joseph Elfassi nous livre, en filigrane, une réflexion abrupte, mais fort perspicace, sur les rapports interculturels et les défis du vivre-ensemble dans une société québécoise de plus en plus bigarrée culturellement.

“Ce hockeyeur musulman m’a servi de baromètre social. Je voulais explorer, par son biais, la réaction collective à sa présence dans un sport vénéré, le hockey, qui est quasiment une religion au Québec. Il représente une minorité religieuse qui, regrettablement, attire les foudres et suscite des controverses.”

Dans La poudre aux yeux, Joseph Elfassi relate, avec un style littéraire efficace et un sens du récit percutant, les péripéties et les espoirs d’une génération qui aspire à changer radicalement le monde.

“C’est l’histoire d’une génération blasée contrainte de se débattre à une époque nébuleuse, et de grandes incertitudes, caractérisée par une quantité énorme d’informations et de connaissances, mais aux perspectives très limitées. Le contraire de ce qu’a connu la génération qui l’a précédée, celle des baby boomers, qui disposait d’une quantité limitée d’informations, mais évoluait dans un monde regorgeant d’opportunités. Il y avait alors beaucoup moins de médias, pas d’Internet, mais la possibilité de vivre pleinement le rêve américain, avec la maison, les deux voitures, les voyages, une carrière prometteuse… La génération qui a suivi a été témoin de la destruction progressive de ce monde, conçu pour d’autres et dans lequel elle n’a jamais eu une place. L’idéalisme et l’espoir qui ont nourri la génération soixante-huitarde sont révolus”, constate Joseph Elfassi, avec une pointe d’amertume.

Dans le dernier volet de sa trilogie romanesque, Joseph Elfassi compte aborder la question identitaire à travers une famille sépharade et son rapport à la judéité.